Nova et Vetera, vol. 89, 1 / 2014

 

La rencontre du Christ à la source de l’évangélisation

Nova et Vetera

Dans son Exhortation Apostolique Evangelii Gaudium du 24 novembre 2013, le pape François rappelle avec vigueur que, à l’origine du fait d’être chrétien, il y a une rencontre personnelle et vivante avec l’amour de Dieu en Jésus Christ. Le christianisme est donc la religion de la rencontre personnelle avec Dieu, qui d’amitié intime avec lui se fait édification de son Royaume dans le monde, joie de l’annonce de la Bonne Nouvelle à l’humanité entière. 

 

Personne humaine et relation : la personne se définit-elle par la relation ?

Gilles Emery, OP

Aujourd’hui, la pensée philosophique inclut souvent la “relation à autrui” dans la définition même de la personne humaine. La théologie comporte également un important courant qui, à partir de la conception des personnes divines comme “relations subsistantes”, soutient que la personne humaine est définie ou constituée comme telle par la relation. Cet article propose une réflexion en quatre temps. Premièrement, il présente quelques-unes des principales voies développées par des auteurs chrétiens en faveur d’une conception relationnelle de la personne humaine ; les approches métaphysiques sont présentées dans une deuxième partie. Le propos de ces deux premières parties est essentiellement descriptif, à la manière d’un panorama du sujet traité. Une troisième partie indique des questions que soulèvent certaines approches relationnelles de la personne humaine (“je suis relation”). Enfin, dans une quatrième partie, l'auteur propose quelques éléments fondamentaux pour un discernement sur cette question.

 

Dieu est-il cause du mal que nous commettons ?

Abbé Matthieu Raffray

S’il est facile pour saint Thomas d’Aquin de prouver l’innocence divine dans le cas du mal commis par les hommes, une difficulté se présente néanmoins lorsqu’il examine plus précisément, dans la partie morale de sa Somme de Théologie (Ia-IIae, q. 79), la responsabilité qui peut revenir à Dieu envisagé comme cause première des actes mauvais que nous commettons. Il ne saurait être question, en effet, d’attribuer toute la causalité de ces actes à l’autonomie de l’homme, comme le fait la pensée moderne, car ce serait alors affirmer que l’acte libre en sa détermination échappe totalement à l’action divine : en commettant le mal, l’homme se ferait lui-même cause première ; et Dieu, lui, resterait finalement impuissant face au mal commis par l’homme ainsi divinisé. Saint Thomas assume donc l’attribution de l’acte mauvais lui-même à Dieu, comme cause première universelle ; et c’est à partir de là qu’il lui reste alors à justifier, contre diverses objections, l’innocence absolue de Dieu.

 

Défenseurs de la foi

Serge-Thomas Bonino, OP

Le combat pour la foi est d’abord le combat personnel que chaque personne mène à l’intime de son cœur contre les tentations de l’incroyance. Mais il consiste aussi, au plan ecclésial, à favoriser la rencontre entre la Parole de Dieu et tous ceux qui l’attendent en secret. Pour cela, ceux qui ont mission de défendre la foi de l’Église veillent à la transmission authentique de la doctrine, mais ils travaillent aussi à rendre audible la Parole de Dieu dans un contexte culturel déterminé, en dénonçant les structures intellectuelles qui font obstacle à la réception de la Parole et en prenant appui sur celles qui la favorisent. Ce combat pour la foi est inséparable d’un « style » : il récuse toute violence parce qu’il croit en la force propre de la vérité.

 

Aimer dans la différence : les grandes lignes d’une théologie du corps

Mgr Livio Melina

Inscrite dans le corps et révélée dans la relation amoureuse, la différence sexuelle appartient à la grammaire même de l’amour et représente l’élément fondamental de son langage authentique. La vérité de la sexualité humaine n’est pas extrinsèquement imposée à l’amour, mais révèle la logique intrinsèque de l’événement amoureux comme événement personnel. Accepter la différence sexuelle, qui connote le corps, comme significative d’une direction éthique de l’agir, veut dire accepter l’horizon de l’amour comme espace de la définition de son identité propre, dans le rapport avec l’autre et dans l’appel à la communion. Et en dernier lieu dans le rapport avec l’Autre, qui est origine et fin de l’être créé et qui est fondement de toute expression d’amour.

 

Le pardon, un lent retour vers la vie

Ange Rodriguez, OP

Le Père Ange Rodriguez o.p. nous livre en ces pages une réflexion puissante sur le pardon, qui, loin de toute banalisation ou réduction simpliste, est conçu comme un processus lent et difficile, mais ouvrant un véritable chemin de vie nouvelle. Cette réflexion, donnée ici sous forme d’interview, s’enracine dans la longue expérience pastorale du Père Rodriguez dans le diocèse de Lyon, où il a exercé, entre autres, le ministère d’exorciste.

 

L’expérimentalisme de Robert Boyle (II)

Michel Siggen

En subordonnant les concepts théoriques à la possibilité d’une expérimentation particulière, Boyle professe une philosophie expérimentale qui a la prétention de remplacer entièrement l’ancienne philosophie de la nature d’Aristote. En effet, Boyle accorde aux axiomes émergents, qui proviennent de l’expérimentation, une primauté méthodologique absolue. Il écarte de la réflexion du naturaliste toutes les considérations logiques antérieures à ces axiomes émergents. Il en vient ainsi à abandonner totalement la méthode aristotélicienne d’étude de la nature. Il considère cette dernière méthode à la fois comme trop abstraite, car trop séparée de l’expérience, et à la fois comme trop précaire, car fondée uniquement sur la connaissance des choses communes. Pour Boyle, la connaissance des choses communes (ou communia) est inintelligible et trop vague. En écartant ce dernier type de connaissance, Robert Boyle a ouvert la voie à la méthode dialectique de la science expérimentale moderne, tout en perdant la possibilité d’une réflexion philosophique sur la nature.

 


 

 

Notes et lectures

Bibliographie

Henri de Lubac-Jacques Maritain, Correspondance et rencontres ‑ René Mougel, Manifeste existence ‑ Maurice Maurin, Vivre la fraternité au cœur du monde ‑ Herbert Hartl, Christliche Weisheit und neues Mensch-Sein.